Les Sept Tours du Diable

Quatrième de couv’ :

Un homme est retrouvé assassiné dans sa chambre d’hôtel en Inde. Peu de temps auparavant, il avait envoyé une mystérieuse et inquiétante lettre à Pierre Cavaignac et Marjolaine Karadec, ses amis archéologues  : « D’effroyables choses se préparent… C’est une question de vie ou de mort. »

La victime était sur le point de révéler un antique secret  : les Sept Tours du Diable. Selon la légende, il existerait sept temples répartis dans le monde, dirigés par des prêtres déviants. Le contrôle de ces centres serait la source d’un pouvoir incommensurable qui attise les convoitises d’un ordre occulte.

Entre légendes ésotériques et science de la génétique, Cavaignac et Karadec se retrouvent au cœur d’une guerre entre l’ombre et la lumière dans une enquête de tous les dangers…

En quelques mots :

L’attente a été longue et après deux ans d’absence suite aux évènements du Code Télémaque, Pierre Cavaignac et Marjolaine Karadec ont fait leur retour ce printemps. Jean-Luc Aubarbier signe aventure à l’autre bout du monde et rend hommage à un auteur et son héros, Henri Vernes et Bob Morane. Forcément, avant même le premier chapitre, l’air de « L’Aventurier » d’Indochine vous trotte déjà dans la tête.

Pour la petite anecdote, j’ai eu la chance de rencontrer Henri Vernes et de lui faire dédicacer L’ombre jaune, une édition de 1980 de la collection Marabout. Un des premiers romans, si pas le premier que j’ai lu dans ma vie et qui a conditionné mon style, mon environnement et mon envie de dépaysement littéraire. Pendant quelques années, j’ai laissé le Lieutenant Morane de côté et même si j’ai fredonné plus d’une fois l’air d’Indochine, j’ai redécouvert le célèbre aventurier avec la trop courte série « Bob Morane Renaissance » aux éditions du Lombard et mis en scène par le trio Dimitri Armand, Luc Brunschwig et Aurélien Ducoudray. À l’automne 2016, l’éditeur annonçait qu’il se séparait des auteurs pour divergences artistiques avec les scénaristes et un manque de communication entre les partis.

Un rapide petit mot sur la première de couverture qui n’est pas sans rappeler ce que Michel Lafon a fait avec les livres de Marcello Simoni avec son héros Ignace de Tolède. Un moine encapuchonné avec un filtre rouge où on joue avec le clair-obscur. Pour que l’envie de lecture soit totale, il aurait été mieux d’avoir un moine bouddhiste avec le décor approprié. L’invitation au voyage aurait été plus forte.

Effet de surprise dès le début du roman où Jean-Luc Aubarbier nous plonge dans une histoire où les Nazis explorent les versants de l’Himalaya afin d’y trouver des traces de la race aryenne. Le Tibet serait-il le berceau de la race qui légitimerait les actions d’Hitler ? Cette accroche n’est pas sans rappeler le premier tome du Cycle du Soleil noir, alias Le triomphe des ténèbres. Sorti à trois ans d’intervalles, les deux romans jouent sur une première partie d’intrigue similaire mais la ressemblance s’arrête là.

La partie historique qui survole la Seconde guerre mondiale en Asie où onmet en scène un protagoniste qui est un mix entre un espion et un aventurier, ce qui donne une interprétation de Bob Morane, le Capitaine Martin Sheen. Notre héros du passé ira à la rencontre de plusieurs personnages historiques. Il interagira avec l’anthropologue nazi Bruno Beger qui a fait parti de l’expédition allemande au Tibet entre 1938 et 1939 dont l’un des buts était revenir à la source de la race aryenne. À la surface du globe, il existe six Tours du Diable et une septième qui est mobile et les dirige. Celui qui possède les sept Tours dominera le monde. Un nouveau grand secret qui risque de bouleverser le monde à la veille d’un conflit mondial.

Le Capitaine Sheen fera la rencontre d’un personnage tout à fait fascinant en la personne d’Ignatius Timothy Trebitsch Lincoln. Un juif hongrois, agent triple qui joua dans le camp nazi. Mais le palmarès du personnage ne s’arrête pas là. Membre du parlement, faussaire, gourou, moine bouddhiste, il tentera dans le roman de devenir le 14ème dalaï lama.

Le travail de documentation de la partie historique a été remarquablement exécuté et on sent toute l’authenticité, ce qui donne beaucoup de plaisir dans cette partie du thriller. Cela renforce le côté roman d’aventure comme pouvait le faire Henri Vernes.

Égaré dans la vallée infernale … Le héros s’appelle Bob Morane …

Pour l’époque contemporaine, on se réjouit de retrouver Pierre et Marjolaine. Les héros iront en Inde puis prendront la direction des hauts plateaux tibétains avant de revenir en France et en Allemagne. Le voyage en Asie des héros pour sauver un ami est également très bien documenté. Je me suis même demandé si Jean-Luc Aubarbier ne nous racontait pas un séjour qu’il aurait fait. Les détails sont nombreux et on entend presque l’effervescence d’une grande ville comme Bénarès ou si on préfère le calme et le côté vivifiant des grands espaces himalayens, vous allez être servi.

La partie contemporaine peut être divisée en deux. Dans un premier temps, nous avons le dépaysement et l’exotisme total avec ce voyage en Asie. Par contre, dès le retour en France, on a presque un côté « pantouflard ». Il semble que les héros vont sur un train de sénateur et qu’on tire quelques grosses ficelles. Un peu comme si les héros étaient infaillibles tel un Bob Morane ou un Tintin. Les situations sont compliquées et au prix de l’une ou l’acrobatie, d’un crochet du droit bien senti, le dénouement se fait tout seul. Si on serait tenté de dire paresse ou facilité scénaristique, je vois là un hommage au genre que Vernes, Hergé et tant d’autres affectionnent.

Je vais vous donner les quelques éléments qui font les héros s’en sortent avec une certaine facilité. Primo, notez bien que les cahiers de bord de Martin Sheen serviront de fil rouge pour aider Pierre et Marjolaine pour mettre hors d’état de nuire la septième Tour du Diable. On va être honnête et vous l’aurez deviné cette dernière tour est plutôt symbolique que physique. Secundo, l’une des thématiques du roman est la montée des extrêmes et quand celles-ci se servent de la science et en particulier de la génétique pour abonder dans leur sens, ça soulève quelques questions. Tertio, toujours en référence à l’univers de Bob Morane, l’Ombre Jaune, alias Mister Ming est facilement identifiable pour le lecteur mais pour les héros. On est tenté de leur dire qui il est. C’est presque téléphoné … Quarto, tant que nous sommes dans le cas de figure du point précédent, réunir les frangins et les frangines du coin pour se concerter et relancer les héros vers une nouvelle piste, j’ai trouvé cela un peu trop facile. On dit toujours qu’il y a plus d’idées dans deux têtes que dans une. Quinto, retenons que le twist final est surprenant car il concerne un moine bouddhiste que nos héros rencontrent à Dhagpo, qui est un centre d’étude et méditation bouddhique, situé en Dordogne. Je ne vais pas en dire plus, il faut laisser le suspens entier.

En conclusion, le thriller est bien construit et l’hommage à Henri Vernes est totalement assumé. Quand on connaît les ouvrages de Jean-Luc Aubarbier, on savait très bien qu’il n’allait pas singer l’auteur belge, ni même le roman d’aventure dont il peut se venter d’être l’un de ses héritiers. J’ai revu récemment des films comme L’Homme de Rio, Tintin et la Toison d’Or et Tintin et les oranges bleues et lorsqu’on compare, on peut affirmer haut et fort que la mécanique est la même sauf qu’on y ajoute un soupçon d’ésotérisme, d’exotisme orientale et de franc-maçonnerie. Bref, c’est une lecture détente qui vous aidera à soigner votre bronzage au bord d’une piscine cet été, sans vous prendre la tête.

Biblio :

AUBARBIER, Jean-Luc. Les Sept Tours du Diable. Bernay : City éditions, 2021. 316 p. (Une enquête de Cavaignac et Karadec ; 6). ISBN 978-2-8246-1831-9